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12 août 2008 2 12 /08 /août /2008 20:15

Sur la peinture et la poésie chinoise en général et les vers parallèles en particulier: 

Les vers parallèles (Duilians) ont une place importante dans la poésie chinoise :

 " Voix des oiseaux rassemblés dans le vieux monastère
Ombres des oiseaux passant sur le froid vivier"
 (Du Fu)


Les correspondances syntactiques sont rigoureusement observées d’une ligne à l’autre, faisant de chacun des deux vers un strict équivalent de l’autre (grammaticalement identiques); de plus le parallélisme nous permet de lire ces vers en long mais aussi en large. Contrairement au mode discursif qui va de l’avant et se déploie dans le temps le mode parallèle suspend l’écoulement temporel, les deux images sont à la fois indépendantes et liées. La poésie chinoise se déroule dans le temps et l’espace comme sa peinture ; peinture, calligraphie et poésie sont intimement liées. Ce principe se manifeste par le courant d'indétermination qui traverse le texte, comme les brumes traversent les paysages chinois ; les Chinois anciens évitaient les représentations humaines, confiant au paysage la tâche de signifier leur monde intérieur.
 Les ressources picturales de l'écriture chinoise dispensent le poète de descriptions verbeuses: il n’explique ni ne raconte (il fait directement voir et sentir) et ce qu’il offre au lecteur n’est pas une description mais une impression ( Par tradition aussi, dans la Chine ancienne, l'homme exprimait ses sentiments par la voix de la femme (lire les poèmes de Li Po*)).

 La peinture idéale n’est pas achevée sur le papier mais dans l’esprit de celui qui la contemple. Nous touchons ici à la question de la valeur active du vide : il s’agit non seulement des blancs de la peinture mais aussi de l’au-delà des mots du poème.
On pense, bien sûr, au similitude et à la filiation avec le haïku qui développe un langage laissant opérer le Vide sans pour autant perdre l'intelligibilité, la fluidité, la lisibilité du texte .

Sur les « Vertus du vide » dans la peinture et la poésie chinoise, voir l’article « Arts et lettres » dans « La forêt en feu » de l’excellent Simon Leys.

 

la froideur des serveurs de l'hôtel de luxe
la chaleur des vendeurs du marché aux puces

à Hangzhou


Un jour si sombre, on voit parfois encore la nuit
Une nuit si longue, on voit presque déjà l'ennui



la jeune fille sage
les yeux baissés sur ses seins




Le plan panoramique correspond à la peinture "dispersée" chinoise qui tend à figurer le paysage tel qu'on le voit en marchant, en opposition à la perspective en ligne de fuite occidentale qui vise à reproduire une image totale et donc statique et subjective du paysage. Le point de vue panoramique permet d'intégrer le foisonnement des "voies" (Dao) dans un ensemble cohérent et sans exclusive...




* "...Nuit après nuit,
je suis seule.
La bougie rouge,
dans son bougeoir d'argent,
elle aussi, laisse couler
des larmes sans fin.

Nuit après nuit,
je laisse libre ta place
sous la couverture,
dans l'espoir
que durant mon rêve
tu te glisse
auprès de moi."
 
 Li Po


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14 mars 2008 5 14 /03 /mars /2008 18:33

  Juste un petit rappel sur la forme des tercets de ce blog : l’approche étant minimaliste, les majuscules se font discrètes et donc ne s’imposent pas souvent; pour laisser une ouverture, un léger flou dans la lecture, la ponctuation s’efface presque ; impression et non description, un léger flottement doit s'en dégager (quand c’est réussi !!)… au risque même d’une impression trompeuse…


dans l’auto
il engueule le GPS
sans résultat


Soyez brefs; faites moi deviner sinon vous lasseriez la fierté de mon esprit. Nietzsche (Dithyrambes de Dionysos)

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5 mars 2008 3 05 /03 /mars /2008 00:00

  On n’écrit pas des haïkus pour écrire mais pour se relier à un instant vécu, éphémère. J’évite de trop transformer le premier jet, de l'arranger pour qu'il fasse plus haïku (le naturel artificiel !). C’est bon ou pas, mais quand c’est bon c’est presque toujours la première vision, la première étincelle ! Le coeur avant la pensée.

(Je mets à part les tercets ou les haïkus de circonstances, plus ou moins inventés, écrits pour le plaisir du jeu, des mots, des sonorités...)  


  un instant
on oublie le bleu...
vol de flamants



avec ses voisines
un voyageur sans âge
vire voyeur

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12 janvier 2008 6 12 /01 /janvier /2008 11:15

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seul dans le bleu ciel
le flamant tricolore
cherche des roses

longeant sa parallèle
l'horizontal
étang de l'Or 


Le tanka comporte cinq vers, de 5-7-5-7-7 pieds (+ ou - !). Le haïku est un dérivé du tanka : dix-sept syllabes constituant les trois premiers vers du tanka. Les rapports entre sexes sont souvent réservés aux tankas.
Le renku est une forme classique de la poésie japonaise ; il est constitué d'une suite de tankas écris à plusieurs et liés entre eux
(exemple contemporain).

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un instant
on oublie le bleu
vol du flamant

 

aveuglant
le soleil sur l'étang
un vol de flamants

 

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3 janvier 2008 4 03 /01 /janvier /2008 20:32

Sous un figuier d'Avignon 
L'ombre verte étais sucrée 
Par les larmes d'une figue.
 Georges Duhamel
 

C'est un tercet, un peu sucré, mais bon... 
Comme quoi, vaut mieux un chouet' petit tercet qu'un mauvais haïku "réglementaire"... :-)



Méfie-toi de la métaphore!
Le "comme", l'inévitable jonction des com paraisons romantiques déplace la vision au lieu de la capter.   


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31 décembre 2007 1 31 /12 /décembre /2007 09:29

l’année s'achève
mettre des bougies neuves
au chandelier

l’année se termine
le mistral se lève
et chasse tout


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Plus que d’autres, la langue française sans ses verbes devient une langue morte. Vouloir à tout prix « écrire japonais» en français me semble vain et un peu ridicule. Si le haïku en français peut se défendre et exister c’est avec les atouts et les particularités de sa langue comme d’autres l’ont fait sans états d’âme (l’anglais bien sûr !). Cela n’exclue en rien le respect des autres règles qui touchent au fond et même à la forme… même celle de ne pas abuser de verbe et de verbiage… 


« La règle n'est pas un modèle fixe, c'est le souffle inspirateur qui structure » Shitao



 

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16 décembre 2007 7 16 /12 /décembre /2007 16:09

seul  
au milieu de la nuit
le clair de lune

transcendentalité : C'est ce qui fait que même dans un haïku trivial, prosaïque, érotique ou même scatologique, il y a parfois quelque chose de plus que ce qui y est dit explicitement… de la tristesse dans la gaité, de l’espoir dans le noir…  

Aïe love you...

 

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21 novembre 2007 3 21 /11 /novembre /2007 11:24
Quelques définitions de mots japonais liés à la pratique du haïku :

Wabi : Austère beauté des choses simples, objets ou écrits; mélancolie, dissimètrie... 

Sabi : l’impermanence de la vie, l'altération par le temps comme la patine, la rouille, la mousse…

Le wabi-sabi est une interaction harmonieuse des deux termes... la beauté naturelle?

Yojô : le non-dit (ne pas tout dire…)
 
Fûryû: Notion simple et complexe qui exprime un idéal d'harmonie avec la nature, un désir d'évasion, le détachement des réalités quotidiennes; signifie aussi le goût pour la poésie, la peinture, le thé, tout ce qui est exempt de prosaïsme.

Kuzari : suspension

Kigos: ce sont les mots de saison
kakekotoba : mot avec un sens multiple (homophone)

kireji: Mot de césure

Sokkio : la spontanéité

Ukiyo : monde flottant

Yugen : mystère
Haïsha: photo avec haïku
Haïga: dessin avec haïku
Tanka: c'est un poème de plusieurs strophes écrit seul ou à plusieurs (on dit alors un renku) dont la forme originelle est un tercet de 17 pieds (ancêtre du haïku) suivi d'un distique de 14 pieds(2x7).
Senryû: similaire au haïku mais avec plus de liberté dans les régles et qui met l'accent sur l'humour, l'ironie, l'auto-dérision, l'humain au lieu de la nature.
Haïbun : Texte poétique en prose parsemé de haïkus ou de senryûs.
Futon : ... Non je déconne...

Glossaire plus complet sur TempsLibres
    


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7 février 2007 3 07 /02 /février /2007 08:30

  Dans le haïku classique on insiste sur l’objectivité dans le regard, la dépersonnalisation presque… Cette démarche peut s’envisager en harmonie avec une approche du zen… très difficilement compatible avec notre culture. Sans remonter à Descartes (" Je pense donc…"), la pensée occidentale se retrouve plutôt dans cette phrase de Lautréamont: « Si j’existe, je ne suis pas un autre. »… Mais je me vois d’une façon et vous me voyez d’une autre… comme vous même… chaque réalité résonne donc différemment… Notre corps est multiple ainsi que notre esprit, mais nous voyons à travers eux, à travers "je"… même si "je" peux être transcendé hors de toute race, de toute culture, de tout sexe, de toute ascendance et descendance.  
 Bref,  je ne suis convaincu que d’une chose, celui qui écrit des senryûs ou des haïkus n’est jamais à chaque fois le même homme… c’est même parfois une femme…

 (Par tradition, dans la Chine ancienne, on exprimait ses sentiments par la voix de la femme... Autre temps...)


 premier rendez-vous
elle a tout prévu
sauf elle 

("je")


 Le "il", lui, est souvent, paradoxalement, une façon plus objective (plus facile?) de dire "je"; "il" peut être un effacement, une universalisation de l’homme, il peut aussi permettre de dire, dans les senryûs, des choses inavouables, qui ne peuvent être connues que du "je" seul…

Retour de voyage
est-ce une impression seulement,
il la trouve plus large
(anonyme… bien sûr !)

 Toute cette digression parce que j’ai lu cette superbe phrase de
Régis Jauffret : 
" Je est tout le monde et n’importe qui."
dans son dernier livre: « Microfictions ».

 

 

 

 

 

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20 janvier 2007 6 20 /01 /janvier /2007 22:29

 "Le haïku, c’est simplement ce qui se passe ici, maintenant."

 

"Il faut écrire sur le banal sans faire dans la banalité"

Bashô

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