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28 juin 2012 4 28 /06 /juin /2012 13:05


Il n’y a que les chemins pour calmer la vie... ou l'agiter.

 jour après jour
de l’orée à la tombée
toujours marchant
 

je suis le bruit de mes pas…

au loin les clochers !
Oh ! Santiago ! Santiago !
Santiago…

dernière vue
du chemin : ma joie
dans ses yeux

Arrivée à Compostelle sur la place de la cathédrale, lieu ultime et immuable.

fin du chemin

les deux jeunes pèlerines 

enfin maquillés

Ah ! l’arrivée
en cadeau une boule
dans la gorge

 Un couple s'éloigne : la femme vient d'arriver et, en découvrant son compagnon venu l'attendre, a poussé un hurlement de victoire magnifique et prolongé.

des pèlerins rient
d'autres prient d’autres pleurent...
les mêmes

 

 L'homme devant nous est un récidiviste (comme moi !), il est calme et serein ; la femme avec les bretelles jaunes, qui porte son petit bébé sur son ventre et pousse une poussette, vient à pied d'Allemagne avec son mari ; le couple avec la femme en rouge s’agenouille et, longuement, embrasse le sol (ils viennent de Hollande) ; quatre amis à gauche en vélo se congratulent bruyamment et se photographient dans toutes les configurations possibles ; de jeunes espagnoles bruyamment repoussent la fin de quelques instants et comprennent que c’est pour la vie, comme un premier amour…

marche éclatante…
avant moi sur l'escalier
des millions de pas

place bondée :
la vision des mesetas 
nues
à la place

bien en place
les touristes photographient
l’émotion

sans paroles...
juste les yeux
et les lèvres

un cycliste chauve se cache
pour pleurer
      

 Beaucoup s'assoient ou s'allongent longuement sur les pavés au centre de la place comme des vainqueurs qui n'arrivent plus à quitter le terrain de leurs exploits.

foule à l'arrivée
les vrais pèlerins ont la marque
des chaussettes

en solo
il ’ communie qu’avec
son portable

la pèlerine seule
serre son bâton

L'euphorie dure quelques heures puis viens la cassure du retour (les retours sont parfois plus aventureux que les départs !).
Certains, très peu, refont le chemin au retour comme les anciens pèlerins : lorsqu'on les croise - halés - couverts de poussière, ils ont la noblesse et le sourire de ceux qui savent.

fin du chemin

un couple s'embrasse
comme au début

infinisterre
le chemin mystérieux
vers l’intérieur

les yeux ouverts
rêvant de Santiago
à Saint-Jacques

 Parlé avec deux hommes partis d'Alès avec cinq chevaux et tout leur bivouac : six mois de voyage, 3 aller et 3 retour par la côte ! Ils disent que c'est le voyage de leur vie… Pour tous les autres aussi sûrement.

pas de pluie ce jour
juste à la fin un peu de bruine 
dans les yeux

nuit de juin
arrivé depuis deux jours…
le bruit de mes pas



P1060566s


(Déjà publié dans la revue 575 haïbun.)


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commentaires

M
<br /> belle série réalité ,  quelques souvenirs et sourires me reviennent en mémoire.<br /> <br /> <br /> Oui, l'essentiel est dans le chemin.<br />
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A
<br /> Ma fascination pour le pèlerinage vient plutôt du chemin lui-même, plus que du but (même s’il y a toujours une quête spirituelle); c’est le<br /> prolongement des transhumances, du nomadisme…<br /> <br /> Lors de mon premier Compostelle (99) j’avais fait un petit site sur les chemins où je mettais ce texte en intro :  <br /> <br /> <br />  Les chemins nous appellent et nous emportent.     <br />  Ils provoquent et stimulent nos désirs et nos rêves. <br /> Ce sont les symboles de nos envies de liberté et de découvertes.<br /> Les chemins de pèlerinages symbolisent cette quête de sentiments.  <br />  Il est significatif de constater que beaucoup de "pèlerins" sont agnostiques; c'est avec ce regard que je les ai<br /> vus, sans mysticisme ou spiritualisme (presque!),  mais avec émotion et même fascination pour tout ce qui s'approche de la "sainteté" (on est fasciné par ce<br /> qu'on n'est pas) et donc du merveilleux.<br /> A.C.<br />
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M
<br /> C'est certainement une expérience unique pour les croyants ; peut-on envisager que des athées suivent ce chemin, comme des "compagnons" ? Je viens de réentendre une interview de Jean Ziegler<br /> (1996) dans l'émission "Noms de dieux" RTBF et malgré son rejet des églises et des religions, il définit ce qu'est Dieu : cette somme des amours que portent les hommes vers autrui. Cela ne m'a<br /> pas déplu.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Je trouve de bien beaux haïkus dans ta série.<br />
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D
<br /> Je suis amusée que tu mettes un point d'interrogation à "haïbun". Il paraît qu'il est aussi difficile de donner une définition du haïbun que de la poésie. C'est tant mieux : il ne faut pas<br /> enfermer la création dans un carcan.<br /> Merci pour cette restitution d'une ambiance unique.<br />
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